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End of Time
19 mai 2015

Soul on Fire, l'évangile de Peter Steele - par Jef

Enfin disponible dans sa version française chez l'éditeur musical (et metal par excellence) Camion Blanc, cet ouvrage biographique consacré à une des personnalités les plus emblématiques et charismatiques du metal depuis vingt ans risque de faire date. Soul On Fire de Jeff Wagner peut déjà être considéré comme le livre de référence des admirateurs de feu Peter Steele. Tout, tout, vous saurez tout sur le Géant Vert, sa vie et son œuvre en vous délectant de ces 623 pages. 

PeterSteele

Il y a les disques qui marquent le metal, les groupes qui font vivre le metal, les personnes qui restent attachées à une certaine esthétique du metal et les livres somme consacrés à ces personnages justement qui peuvent déjà faire l'objet d'un culte. Peter Steele nous a quitté le 14 avril 2010, mais connaissions-nous vraiment l'homme et son oeuvre ? C'est peut-être la question que s'est posée Jeff Wagner, journaliste américain, co-éditeur du magazine Metal Maniacs et déjà auteur de Mean Deviation ouvrage consacré au metal progressif en 2010, lorsqu'il a envisagé d'écrire Soul On Fire, une biographie consacrée au charismatique ex-frontman de Type O Negative. Un livre qui est disponible chez Camion Blanc depuis le mois de février.

Interrogeant proches (sœurs, voisins de quartier et ex-petites amies), membres de son dernier groupe, qui se seraient parfois montrés réticents à la rédaction de cet ouvrage mais n'en ont pas pour autant empêché la parution, anciens musiciens de ses autres projets et toutes les personnes ayant côtoyé l'artiste depuis son enfance, Wagner nous raconte tout simplement l'histoire de Peter Steele.

Une légende qui prend acte dans le Brooklyn des années soixante, là où voit le jour Peter Ratajczyk, fils d'un ouvrier d'origine polonaise (dont il hérita de la taille et de la voix de baryton impressionnantes) et d'une mère au foyer aimante, entouré de cinq sœurs, qui allait au fur et à mesure de son adolescence et de sa jeune vie d'adulte se construire un univers artistique bien à lui.

 Du premier véritable groupe, précurseur par son mélange de heavy metal et de new wave, Fallout formé avec son ami d'enfance Josh Silver au projet Repulsion qui allait devenir Type O Negative, l'auteur analyse et nous explique ce qu'étaient les obsessions stylistiques de Steele.

Un être complexe se réfugiant dans des personnages comme Lord Petrus Steele par exemple. Ce leader d'une horde de barbares post-nucléaires connus sous le nom de Carnivore prêts à répandre sang, violence et sexe s'illustra d'abord à travers un thrash metal virulent avant de prendre le train du hardcore new-yorkais et de s'orienter vers un crossover qui conservera le côté brut de décoffrage et non-politiquement correct des débuts du gang.

A noter d'ailleurs que chaque enregistrement du grand Pete est disséqué justement dans cet ouvrage et leur genèse relatée en détails. Si vous voulez connaître les rêves et déceptions de Steele (Type O Negative serait né des désillusions engendrées par la fin de carrière qu'a connue Carnivore et d'un chagrin d'amour ayant conduit son leader à une tentative de suicide par exemple), ses opinions politiques parfois assez conservatrices et son sens de la provocation qui lui valurent quelques ennuis avec les médias et une partie du public, le livre de Jeff Wagner est pour vous. Vous voulez savoir quelles étaient ses petites manies (comme cette fixation sur l'ordre qui se traduira jusqu'au design des pochettes de Type O qu'il dessinera lui-même), ses intérêts (Steele vouait un véritable amour pour la nature et les chats mais aussi les sciences qu'il a étudiées à l'université), ses relations sentimentales difficiles et chaotiques qui lui inspirèrent la plupart des meilleures chansons de Type O Negative Soul On Fire est là pour vous raconter tout cela aussi. De même, vous y apprendrez qu'au delà de l'apparence froide et guerrière, Peter Steele était un être sensible, plutôt introverti, ayant choisi de continuer à habiter chez ses parents malgré le succès grandissant, souffrant d'un trac pathologique, qui pour faire face aux inconvénients liés au star system est tombé dans le piège de la drogue et de l'alcool. Ce qui conduira à sa perte.  

Portrait de Peter Steele par Nicolas Castelaux

Soul On Fire est composé de trois parties, chacune portant le nom d'une couleur symbolique attachée à une partie de la vie de Steele. Il y a d'abord le rouge consacré à l'enfance et l'adolescence du rocker, ses influences, son environnement familial et amical, son éducation catholique plutôt rigide ; tout ce qui a forgé sa personnalité et donné base à son art musical. C'est l'époque des premiers pas dans l'industrie musicale et des désillusions qui suivirent. Puis vient le vert, couleur du Green Man (surnom donné à cause de sa tenue d'employé municipal des espaces verts de Brooklyn qu'il aimait porter en permanence) quand Peter est devenu définitivement Steele en donnant naissance au monstre sacré du gothic metal Type O Negative. Époque du succès naissant, de la gloire et de tout, positif comme négatif, ce qui est lié à la surexposition médiatique, époque des décès autour de lui aussi, des drames comme nous le précise Jeff Wagner qu'il n'arrivera jamais vraiment à surmonter. Avant que le noir ne domine la dernière partie, celle d'un homme incapable de gérer sa vie privée, ses addictions de plus en plus envahissantes, ses drames intérieurs et sa carrière. L'époque des crises d'inspiration, des cures de désintoxication, des problèmes psychiatriques et du séjour en prison avant la rédemption par la foi retrouvée après des décennies d'athéisme assumé. Avant cette fin triste et fatale, dans une ambulance le menant à l'hôpital, à cause de complications intestinales non traitées à temps, alors que l'homme en vert trouvait enfin un début de sobriété et de sérénité, vivant avec son chat et sa dernière petite amie dans un modeste appartement new-yorkais, s'apprêtant à refaire surface en composant de nouveau. Ce qui laisse une impression de gâchis tant ce grand homme semblait encore avoir de choses à nous offrir.

A la fin de sa vie Peter Steele envisageait de reprendre un emploi de jardinier, le seul métier qu'il aimait vraiment. La musique pour lui n'était qu'une forme d'expression, un art plus qu'une obligation. Il avait la nostalgie de l'époque où il était un simple employé municipal, nettoyant et entretenant les parcs de son cher Brooklyn. Ainsi se referme la lecture de cet ouvrage à la fois passionnant et émouvant.

Signalons aussi que la version française née sous la traduction de Nicolas Castelaux, actuel directeur de publication des éditions Camion Blanc et Camion Noir, écrivain spécialiste des tueurs en série et des musiciens sulfureux (signalons notamment une biographie consacrée à Varg Vikernes) mais aussi peintre et surtout grand fan de Peter Steele comporte un charmant épilogue nous relatant sa rencontre avec le leader de Type O Negative. Nicolas avait avant la parution de Soul On Fire le projet d'écrire sa propre version de la saga de Lord Petrus Steele, un projet qui ne serait qu'endormi pour le moment selon ses dires...

Terminons en citant ce passage ouvrant la biographie qui résume tout à fait qui était le premier citoyen du Vinland (Etat virtuel né de la fascination de Steele pour les tribus nordiques) : « Le demi-dieu à la crinière noire, vu d'ici, a l'air invincible. Son arme à quatre cordes est harnachée sur son épaule gauche en position d'attaque, ses braillements sont accueillis religieusement par des milliers de serfs enthousiastes, sa présence impose le respect, chacun de ses mouvements est savamment étudié. Il a le magnétisme d'un dictateur présidant une assemblée de 100 000 de ses sujets. A ce moment précis, il est éternel. A ce moment précis, il est le monde tout entier. A ce moment précis, tout ce qu'il souhaite, c'est rentrer chez lui, avec Papa et Maman, à Brooklyn, dans se chambre au sous-sol, avec ses chats, ses outils électriques, et ses livres. Il chie dans son froc. Le trac est devenu insupportable. » Insupportable la lecture de ce livre qui parle à tous ceux et celles qui ont rencontré l'oeuvre musicale de Peter Steele un jour dans leur vie ne l'est pas. Ce demi-dieu avait droit à son livre sacré, Soul On Fire peut être considéré comme étant son évangile.



 

 

 

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